La vie de château
Oenotourisme slow en Ardèche
Elle n’est peut-être pas aussi prestigieuse que ses cousines de la vallée du Rhône à l’est, mais la scène viticole ardéchoise a fait vibrer quelques tonneaux ces dernières années. Avec de jeunes vignerons enthousiastes qui adoptent la vinification biologique et biodynamique, la qualité est en hausse, ce qui l’aide à se défaire de l’image de «vin de table».
La région est surtout connue pour ses gorges profondes à descendre en canoë, ses grottes paléolithiques à traverser et ses villages médiévaux perchés sur les collines, ce qui rend les principaux sites touristiques bondés en été. Ce qui l’est moins, ce sont les vignobles.
Ce mélange de merveilles naturelles, d’histoire riche et de vignerons enthousiastes constitue une étape intéressante au cours du voyage d’un oenotouriste.
Faisant officiellement partie de la Vallée du Rhône mais situé un peu plus à l’ouest, l’Ardèche ne compte que 8500 hectares de vignes, détenus pour la plupart par ses 14 coopératives, ainsi que 58 indépendants. Les appellations sont les suivantes: IGP Ardèche, (qui comprend les Coteaux d’Ardèche), Côtes du Rhône, Côtes du Rhône Villages et Côtes du Vivrais. Les cépages sont pour la plupart ceux que l’on trouve dans la région de la Vallée du Rhône, comme le Grenache, la Syrah, le Viognier, le Cabernet Sauvignon, le Merlot etc, mais leurs cépages locaux, Chatus et Plan Brunel méritent d’être découverts.
Ma première raison pour aller en Ardèche, je l’avoue, n’avait rien à voir avec le vin, mais une visite peu importe le lieu en France n’est pas complète sans aller sentir quelques vignes. Et en bon vieux vagabond du vin, j’ai bien choisi mon hébergement : un château du 13ème siècle au milieu d’un vignoble.
Je m’attendais presque à ce qu’un fossé descende lorsque j’ai emprunté l’allée de gravier. De majestueux peupliers entouraient l’entrée, ce qui, autrefois, était un signe de bienvenue pour les voyageurs de passage. Si le château a été bien rénové depuis, l’esprit des peupliers reste intact. Les Ardèchois, je l’ai constaté, sont plutôt sympathiques.
J’ai choisi le château de la Selve. Il a une histoire assez prestigieuse, servant autrefois de poste de frontière pour garder le Royaume de France (comme on l’appelait à l’époque), il a été offert par le roi Henri III au duc de Joyeuse (qui est une ville voisine). Plus tard, et pendant un certain nombre d’années, il a également servi de base à l’aristocratie comme lieu de chasse. Des siècles plus tard, il conserve toujours un sentiment d’aristocratie et, avec ma chambre dans l’une des tours, j’étais presque tenté de laisser tomber mes cheveux à un courtisan en bas. Il n’y avait pas de courtisan à la fenêtre, mais il y avait un extraordinaire sentiment de calme, avec la pelouse parfaitement entretenue, au loin les chevaux paissant dans le paddock et les vignes se balançant dans la brise.
L’hébergement se compose d’appartements joliment aménagés, il s’y dégage une atmosphère chaleureuse et détendue avec de jolis petits coins pour lire sous un arbre ou paresser au bord de la piscine. Je me suis sentie comme à la maison, discutant avec les autres hôtes que nous croisions, avec le propriétaire extrêmement sympathique et avec la charmante directrice Véronique. Et puis, bien sûr, le vin…
Le Château de la Selve produit du vin depuis le début des années 2000. Il s’est converti au bio en 2008 et à la biodynamie quelques années plus tard. Assurez-vous de réserver un créneau pour la visite guidée et la dégustation, car cela a été un moment fort de mon séjour. Vous serez immédiatement conduit vers le château en passant par les merlots, s’ils sont encore là, car ils sont progressivementremplacés par d’autres cépages plus adaptés comme la Syrah, le Grenache, le Cinsault, le Viognier…. Un récit complet et passionnant de l’histoire puis c’est le retour à la cave pour découvrir leurs différentes méthodes de vinification. Si vous êtes chanceux comme moi, vous dégusterez quelques gorgées de différents fûts pour apprécier l’évolution du vin, et vous pourrez vous approchez de leurs amphores en terre cuite, qui n’enlèvent rien à l’aura aristocratique. Je pourrais vraiment m’habituer à la vie de château.
Où
Château de la Selve, Grospierres, Ardèche. Environ 110 euros par nuit pour un appartement.
À faire
Descendre les gorges en canoë de Vallon Pont d’Arc
Notes de dégustation
La Petite Selve (rouge)
Je l’ai partagé avec des amis lors d’un pique-nique et tout le monde a adoré – des fruits rouges riches et généreux, un peu d’épices et de tanins, chaleureux et convivial.
Serre de Berty (rouge, 2018)
Celui-ci est plus sérieux, avec un fruit un peu plus atténué, faisant place à des touches terreuses, une finale plus longue et des tanins plus robustes. Je l’ai bien apprécié sur le moment mais il vieillira bien aussi. J’ai également pu essayer la version 2007, qui était, comme prévu, moins fruitée avec des notes plus terreuses et des tanins plus doux.